Légende et histoire d’ Allons (Lot et Garonne)
Le souvenir d’Henri IV, « noste Henric », seul roi dont le peuple ait gardé la mémoire dans notre région, est resté très vivant dans nos contrées et surtout en Albret ou il vécut dans sa jeunesse.
La lande toute entière retentit longtemps du bruit des chasses princières. Mais la « galanterie » était son point faible et il allait par les chemins contant fleurette à toutes !
De nombreuses fontaines dans nos campagnes sont appelées « Fontaine d’Henri IV » car, d’après la légende populaire il s’y serait arrêté pour boire et abreuver son cheval mais aussi pour quelques aventures galantes… D’après certains nous serions pratiquement toutes et tous, dans notre région, des descendants d’Henri IV !
Nérac se souvient surtout de la belle Fleurette, mignonne jardinière, qui noya son chagrin dans les eaux de la Fontaine, témoin de son bonheur perdu….
Les Lugues et Allons se souviennent plutôt de la Charbonnière de Capchicot.
Capchicot est un lieu-dit
sur la commune d’Allons,
dans le canton de
Houeillès (Lot et Garonne)
en pleine forêt des Lugues.
Voila ce que dit la Légende….
C’était en 1578. Henri de Navarre habitait alors Nérac.
Un jour, à la fin d’une longue journée de chasse dans la forêt de Durance, où il avait un château, Henri, trop éloigné de ses compagnons et surpris par la nuit s’égara au milieu des landes….
Il chercha longtemps un asile pour se reposer et manger et il découvrit enfin la cabane d’un charbonnier.
» Tu es charbonnier, il paraît, dit le roi?
« C’était l’état du père » répondit l’homme..
« On l’appelait Saint Vincent Capchicot, et comme on me voyait faire cuire le charbon avec lui, on m’appelle aussi Capchicot, surnom qui nous vient de ceci, de notre petit bien; autrement Saint Vincent est notre nom de famille »
Le charbonnier ne connaissait pas le roi, mais voyant en lui un chasseur égaré et qui paraissait un assez bon convive, il le reçut avec cordialité.
Du pain de seigle noir, du fromage et un mauvais vin, tel fut le repas servi au Roi de Navarre… mais il était affamé et la femme du charbonnier, Elisabeth, fort jolie ! aussi le Roi trouva-t-il ce repas excellent !
Capchicot avait bien, dans un coin de sa cabane, bien cachée, une hure de sanglier… mais comme la chasse de ces animaux était interdite, il craignait de se confier à un inconnu .
Bientôt, vaincu par la gentillesse et l’air de franchise de son invité, il lui dit qu’il lui donnerait volontiers quelque chose de mieux, s’il pouvait compter sur sa discrétion.
» Pour n’avoir pas de désagrément, il vaut mieux ne pas chasser » dit-il à son invité.
« Et pourtant je ne sais me priver de te le dire mais, au moins au Grand Nez ne lui raconte pas .
Tu m’entends, ne va pas dire que je suis chasseur, il me ferait assigner ! »
L’Invité promit tout et fit honneur au nouveau mets.
L’heure du coucher amena un combat de politesse entre le charbonnier et son hôte. Enfin, on transigea : le charbonnier, voulant être maître chez lui, dicta les conditions et se retira dans le réduit, laissant son lit… avec son épouse dedans ! au Roi.
Au petit matin, « Noste Henric » repartit sans avoir révélé son identité .
Quelques temps après, Capchicot étant allé à Nérac pour des affaires, le roi l’envoya chercher. Celui-ci se crut perdu et sa frayeur redoubla quand il reconnut dans son hôte, le Grand Nez qu’il redoutait tant !
Mais le Roi Henri le remercia de l’accueil qu’il lui avait fait, sans dire un mot de la hure de sanglier…et il lui offrit toutes les grâces qu’il désirait.
Le modeste charbonnier se contenta de demander la concession de la place du marché au charbon, avec exemption de tous droits à l’avenir ! ce privilège lui fut accordé….
On dit que la charbonnière eut un fils quelques temps après, fils d’Henri IV sans doute ! la charbonnière était jolie et Henri IV ne fut pas ingrat.
Etienne Saint Vincent Capchicot et sa postérité furent anoblis par lettres patentes du 20 avril 1597.
Il reçut aussi en cadeau le Château de Capchicot, construit en 1579, et acheta le manoir voisin de la Tour neuve.
Les faveurs dont le roi Henri combla le Charbonnier et sa famille, supposent une reconnaissance que ne suffisent sans doute pas à expliquer les menus services rendus par le charbonnier à un chasseur égaré…